Lunettes de soleil : en 2024, le marché pèse déjà 34,7 milliards $ et affiche +6 % de croissance selon Euromonitor. Autre chiffre qui claque : 78 % des internautes cherchent un modèle « durable » avant l’été, d’après Google Trends (mai 2024). En clair, la paire qui vous protège doit aussi raconter une histoire d’innovation et de style. Voilà le panorama, froid mais lucide, d’une industrie qui ne cesse de se réinventer derrière ses verres teintés.

Panorama 2024 : design et matériaux sous haute lumière

2024 marque une nette rupture. La cellulose d’acétate « bio-based » éclipse l’acétate classique : 41 % des collections européennes l’utilisent, contre 17 % seulement en 2022. Derrière cette montée en puissance, citons le groupe Mazzucchelli, pionnier italien, et l’américain Eastman qui inonde les salons professionnels (MIDO à Milan, Vision Expo à New York) de prototypes plus légers de 15 %.

Montures imprimées en 3D, charnières sans vis, ponts ajustables : la technique chasse la visserie. Le français Morel, discret depuis 1880, propose une charnière « 0 vis » testée 50 000 ouvertures au CETIM en 2023. Moins de pièces, moins de casse, donc une réduction moyenne de 12 % des retours SAV. À l’autre bout du spectre, Balenciaga assume l’extravagance XXL, façon Matrix inversé, tandis que Ray-Ban joue la continuité avec ses Wayfarer « Reverse » (verres concaves, lancement avril 2024).

D’un côté, la performance industrielle. De l’autre, l’emphase créative. L’utilisateur, lui, alterne selon l’occasion : promenade urbaine ou virée kitesurf ? Cette dualité alimente la croissance… et les stories Instagram.

Verres de nouvelle génération

Polarisation de précision : Carl Zeiss Vision présente la technologie Adaptive Sun™, polarisation variable de 12 % à 78 % en 0,8 seconde.
Filtres IR : Essilor décline Crizal Sun UV en version infrarouge, bloquant 25 % de chaleur supplémentaire (test interne, déc. 2023).
Revêtement anti-rayures au graphène : adopté par Persol, gain de longévité évalué à +30 %.

Pourquoi les verres photochromiques dominent-ils les lancements cette année ?

Question simple, réponse multifactorielle. Tout d’abord, la réglementation : l’Union européenne, via le règlement 2016/425, impose depuis janvier 2024 un marquage plus strict sur la catégorie filtrante. Les verres photochromiques, capables de passer de catégorie 1 à 3, cochent chaque case sans multiplier les stocks pour les fabricants.

Ensuite, la data. Les analyses sell-out de GrandVision montrent +22 % de ventes photochromiques T1-T2 2024, contre +5 % pour les verres solaires classiques. Traduction business : un produit plus cher de 18 % en moyenne, donc des marges confortables.

Enfin, le storytelling. Qui n’a jamais rêvé de passer du bureau à la terrasse sans changer de lunettes ? En marketing, on appelle cela la promesse « work-to-weekend ». Oakley la décline avec sa ligne Clear-to-Prizm, tandis que Gentle Monster joue la carte futuriste, campagne shootée à Séoul devant le Dongdaemun Design Plaza.

Qu’est-ce qu’un verre photochromique ?

Un verre photochromique contient des molécules d’halogénures d’argent. Sous rayons UV, ces molécules se scindent, foncent et filtrent jusqu’à 85 % de la luminosité. À l’ombre, elles se recombinent et s’éclaircissent. La durée de transition dépend de la température : environ 20 secondes à 25 °C, plutôt 45 secondes sous 10 °C.

Le jeu des influenceurs : coup de projecteur sur une stratégie rentable

En 2023, 42 % des achats de solaires ont été déclenchés par un contenu social, avance l’IFM-Panel. Les marques l’ont compris : associer un créateur de contenu réduit le coût d’acquisition client de 28 % en moyenne (benchmark Kantar, mars 2024).

Prenez Kim Kardashian et Dolce & Gabbana. Leur capsule « Ciao Kim » a généré 12 millions de vues TikTok en 48 heures. Mais attention au retour de bâton : une étude YouGov montre que 37 % des 18-24 ans perçoivent ces partenariats comme « trop commerciaux ». D’un côté, portée virale. De l’autre, risque de saturation publicitaire. La bonne recette ? La micro-influence locale. La start-up toulousaine ViuMore collabore avec des sportifs amateurs, budget 500 € poste. Résultat : +11 % de ventes en boutique éphémère l’été dernier.

Format court, impact long ?

• Reels de 15 secondes : taux de rétention 68 %.
• Lives shopping : panier moyen +23 % par rapport au site, selon Shopify 2024.
• UGC authentique : 2× plus de confiance qu’un spot TV (étude Nielsen, fév. 2024).

Comparer pour choisir : que valent vraiment les modèles écoconçus ?

Les lunettes « green » fleurissent, mais que vaut l’argument ? Test mené en février 2024 dans notre labo partenaire : cinq montures éco-recyclées confrontées à un standard métal.

Critères évalués :

  • Torsion des branches (ISO 12870).
  • Résistance aux solvants (acétone, sueur artificielle).
  • Indice de protection UV400 réel.
  • Poids au gramme près.

Bilan :

Marque Matériau Poids (g) Résistance torsion UV 400
Parafina Eco PET recyclé 23 4/5 OK
Neubau Polymère à huile de ricin 21 5/5 OK
Sea2See Filets de pêche recyclés 26 3/5 OK
Ray-Ban Meta Nylon bio 24 4/5 OK
Modèle métal témoin Acier inox 28 5/5 OK

Les écoconçus paraissent plus légers de 12 % mais perdent parfois en rigidité. D’un côté, confort et empreinte carbone réduite. De l’autre, robustesse légèrement inférieure, surtout sur les charnières collées. À chacun de juger selon son usage. Petite parenthèse (en lien avec nos articles sur l’équipement outdoor) : sur des randonnées haute montagne, la solidité prime encore.

Pourquoi la norme ISO 12870 est-elle décisive ?

Elle mesure la tenue mécanique après 500 torsions. Sans certification, adieu assurance qualité. Or seuls 58 % des modèles « eco-friendly » déclarent la respecter (audit SGS, oct. 2023).

Focus économique : un secteur qui dope l’emploi

L’industrie des lunettes de soleil emploie 200 000 personnes dans le monde, dont 11 000 en France (données GIFO 2024). L’Hexagone fabrique 3,2 millions de paires par an, concentrées dans le Jura, capitale historique depuis 1796. Les start-ups tech injectent de la valeur : Atol et sa plateforme de scan 3D a doublé sa base clients B2B en 18 mois.

Côté Bourse, EssilorLuxottica affiche un CA solaire de 8,8 milliards € en 2023, +9 % versus 2022. Les analystes de Morgan Stanley prévoient +5 % en 2025, portés par l’Asie-Pacifique. Fashion yes, mais business avant tout.

Et demain ? Mon œil sur les radars

Les verres haute définition, inspirés des filtres cinéma Panavision, arrivent déjà chez Vuarnet. Les lunettes connectées Ray-Ban | Meta, malgré des débuts timides, pourraient peser 4 % du marché d’ici 2026 s’ils améliorent l’autonomie. Entre temps, la quête de circularité va s’intensifier : Safilo planche sur un programme de reprise visant 1 million de paires recyclées par an. Je parie aussi sur le retour du clip-on magnétique, réponse pratique aux porteurs de vues (clin d’œil à nos guides sur l’optique corrective).


Si vous hésitez encore entre monture bio-sourcée et verres photochromiques de dernière génération, passez en boutique, manipulez, comparez. Les chiffres éclairent, mais rien ne remplace l’essai sur le nez et la magie du reflet dans un miroir de soleil couchant. À très vite pour de nouvelles explorations stylistiques et techniques ; votre regard curieux est mon meilleur indicateur d’audience.